Jules à Lille
Qui
pleure dans la nuit? C'est l'âpre vent d'automne,
Sous les toits
dans Paris, en infects galetas
Où des agonisants que ne veille
personne
Se retournant sans fin leurs vieux matelas
Écoutent
dans la nuit pleurer le vent d'automne.
Sonne,
sonne pour eux, vent d'automne, ton glas !
Au plus chaud de mon
lit, moi je me pelotonne
Et je ferme les yeux, je veux rêver,
très-las,
Que je suis dans le ciel au haut d'une colonne
Tout
seul, dans un déluge éternel de lilas.
Ah!
j'entendrai toujours pleurer ce vent d'automne.
Vierge qui doit
m'aimer, dis, ne viendras-tu pas
M'endormir sur ton sein d'une
chanson bouffonne
Pour m'emporter bien loin dans des pays,
là-bas,
Où l'on n'entend jamais pleurer le vent d'automne!
Jules Laforgue 'le vent d'automne'